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LE TELEGRAPHE DE CHAPPE
(D'après Radio REF, article de F6GPL)
C'est à la fin du XVIII° siècle que les moyens de transmission vont
naître. A cette époque où tant d'idées nouvelles et généreuses
bouillonnent dans tant de têtes; où nombre d'évènements se préparaient
ou s'accomplissaient, on ressentait le besoin de diffuser rapidement
les nouvelles. Encore fallait-il en découvrir le moyen. Déjà sous le
règne de Louis XIV, un savant, Guillaume Amontons avait correspondu de
Meudon à Belleville grâce à des lettres de l'alphabet.
Ces lettres de l'alphabet étaient accrochées à une aile de
moulin et que l'on découvrait de Meudon par une lunette d'approche.
Encore, en 1778, un certain monsieur Dupuis, écrivain, présentait au
ministre un projet de transmission alphabétique dont il avait
fait l'essai entre Ménil-montant et Bagneux en correspondant de sa
maison à celle d'un ami. Ces deux procédés étaient lents et de courte
portée. Ils ne furent pas utilisés, mais ont probablement aidé à
l'invention qui va suivre.
Avez vous remarqué que, lorsqu'on aperçoit une personne sans pouvoir la
joindre à la voix, on a tendance à faire de grands gestes des bras? Eh
bien, Claude Chappe, ingénieur et physicien Français, a traduit cette
impulsion lorsqu'il créa le premier appareil mécanique de transmission.
Il l'appela - le télégraphe - Cela se passait à Brulon dans la Sarthe,
où notre inventeur était né. Son appareil est un sémaphore. Il se
compose de trois pièces articulées entre elles.
Chaque pièce est constituée d'un cadre en bois garni de lames de cuivre
disposées comme les lames d'une persienne afin de ne pas donner de
prise au vent. La pièce centrale, la plus allongée, repose sur un pied
et peut tourner dans le plan vertical. Elle peut prendre, entre autres,
quatre positions repérées: 1 horizontale, 2: inclinée à droite à 45
degrés, 3: Verticale, 4: inclinée à gauche à 45 degrés. Deux pièces
latérales, appelées ailes, sont placées aux extrémités de la pièce
centrale, sur laquelle elles tournent dans le plan vertical. Ces ailes
peuvent prendre sept positions repérées par rapport à la pièce
centrale. En articulant différemment les trois pièces, on peut obtenir
cent quatre vingt seize positions. à savoir: les 4 positions de la
pièce centrale, multipliées par les 7 positions de l'aile droite
donnent 28 positions qui, multipliées par les 7 positions de l'aile
gauche donnent un total de 196 positions.
En employant une lunette d'approche, ces 196 positions sont nettement
distinguables les unes des autres à une très grande distance. Une
grande portée est donc possible. En codifiant les différentes
positions, c'est à dire en donnant une signification à chacune d'elles,
on donne un langage au télégraphe. Un langage de 196 mots n'est pas
suffisant. Alors Chappe a l'idée de composer une sorte de dictionnaire,
spécialement adapté à son télégraphe, qu'il appelle recueil.
Ce recueil compte 92 pages comportant chacune 92 cases, soit un total
de 8464 cases. Chaque case montre à la fois la signification et la
position à donner aux trois pièces de l'appareil. Chappe crée ainsi
trois recueils : Le recueil des mots courants, qui inclus dans ses 8464
cases les lettres de l'alphabet, les nombres, les signes de ponctuation
et les mots le plus fréquemment utilisés. Il faut deux signaux pour
distinguer le mot à transmettre.
Le premier pour indiquer la page du recueil et le second pour indiquer
le numéro de la case ou se trouve le mot dans la page. Un deuxième
recueil contient 8464 membres de phrases courantes. Son emploi
nécessite 3 signaux. Le premier pour désigner le recueil concerné, le
deuxième pour indiquer la page et le troisième pour indiquer la place
de la phrase dans la page. Un troisième recueil à 3 signaux, est
utilisé pour les noms géographiques, les noms de villes de France et
les états.
L'emploi d'un recueil donnait un avantage resté jusqu'alors inemployé.
Ajouté à la simplicité de positionnement des trois pièces mobiles, il
apporte un énorme progrès dans la vitesse de transmission. En effet, le
temps nécessaire pour transmettre un membre de phrase ou un terme
géographique est à peine supérieur à celui nécessaire à la transmission
d'une seule lettre. Avant de réaliser un système aussi élaboré, Claude
Chappe avait expérimenté un autre procédé.
Le 2 mars 1791, il avait expérimenté un procédé en utilisant des
panneaux de bois qui s'effaçaient en pivotant. Les panneaux qui
mesuraient 1,65 mètre sur 1,33 mètre, étaient placés sur un mat de 4
mètres de haut. Un des appareils avait été placé sur la plate-forme du
château de Brulon, l'autre sur la maison du sieur Perrotin dans la
commune de Parcé sur Sarthe distante de 15 kilomètres.
Après cette expérience réalisée avec ses frères : Ignace, l'aîné,
Pierre, René, et Abraham, devant des notables locaux, l'Abbé Chappe (
Claude Chappe était non seulement ingénieur et physicien mais aussi
Abbé ), fut à ce point encouragé qu'il décida de se rendre à Paris. A
la fin de 1791, il obtint la permission d'établir un télégraphe à la
barrière de l'étoile. A peine terminé, l'appareil disparut
mystérieusement durant la nuit et ne fut jamais retrouvé.
Je ne sais pas ce qu'il en était des services secrets de cette époque
mais notez la coïncidence : peu de temps après, un anglais fit les
premiers essais d'un télégraphe à panneaux pivotants et, en 1796, un
télégraphe constitué d'un cadre dans lequel pivotaient 6 volets mobiles
fut installé sur l'hôtel de l'Amirauté à Londres. Six mois plus tard,
l'abbé Chappe, que rien ne décourageait, obtint de monsieur Lepelletier
de Saint-fargeau l'autorisation d'installer un nouveau télégraphe
dans son parc de Ménil-montant.
Il coûta beaucoup à la famille et les frères Chappe allaient y
travailler tous les jours. Un après-midi, comme ils entraient dans le
parc, ils virent le jardinier de monsieur de Saint-Fargeau qui courait
au devant d'eux en leur criant de se sauver, qu'on avait mis le feu au
télégraphe et que, s'ils paraissaient, on les jetterait au milieu des
flammes. Ils retournèrent sur leurs pas sans pouvoir s'expliquer cet
événement qui les consternaient.
Ce ne fut que le lendemain qu'ils apprirent qu'une populace effrénée
s'était portée à ces actes de violence parce qu'on soupçonnait que le
télégraphe servait à communiquer avec le roi emprisonné. Pour la
troisième fois, Chappe sollicita l'autorisation de poursuivre ses
expériences. Il l'obtint par l'entremise de son frère, membre du comité
d'instruction publique. La guerre est sur toutes les frontières et il
est important que le comité de salut public soit informé rapidement des
événements.
Chappe reçoit six mille francs, prélevés sur les fonds du ministère de
la guerre. En trois mois, celui-ci réalise une ligne expérimentale.
trois postes sont construits : le premier à Ménil-montant, le deuxième
à écouen, distant de paris de deux myriamètres (unité de mesure créée à
la révolution française et valant dix kilomètres), le troisième à Saint
Martin du Tertre, à trois myriamètres et cinq kilomètres de Paris.
Après de nombreux essais, le télégraphe prend sa forme définitive et la
convention désigne Daunou, Arbogast et Lakanal comme commissaires au
télégraphe. Afin d' être précis sur la façon dont les choses se sont
passées, je vais vous citer le compte-rendu officiel : Le 12 juillet
1793, les membres de la commission et un grand nombre de savants et
d'artistes, ainsi que des hommes politiques, assistaient à l'expérience
décisive.
Dans chaque poste se trouvaient 2 stationnaires, l'un aux lunettes,
l'autre à l'appareil. Chappe et ses frères, le vocabulaire à la main,
étaient aux 2 stations extrèmes. Lakanal et Arbogast se rendirent à
Saint Martin du Tertre tandis que Daunou restait à Ménil-montant. à 4
heures 26, le poste de Ménil-Montant commença la transmission de la
phrase suivante : Daunou est arrivé ici. Il annonce que la convention
nationale vient d'autoriser son comité de sûreté générale à apposer les
scellés sur les papiers du représentant du peuple.
Cette dépêche fut transmise en 11 minutes. Saint Martin du Tertre
transmis en 9 minutes la dépêche qui suit : Les habitants de cette
belle ville sont dignes de la liberté par leur amour pour elle et leur
respect pour la convention et ses lois. à ce propos, Chappe écrivait :
Ces messieurs ne purent cacher leur surprise en voyant avec quelle
facilité et quelle promptitude nous transmettions à 3 myriamètres et 5
kilomètres les dépêches qu'ils nous donnaient.
Peu de temps après, la commission rend un avis favorable et, le 4 août
1793, Lazare Carnot, qui réorganise l'armée, décide de réaliser deux
lignes. La première relie Paris à Lille, la deuxième relie Paris à
Landau en Allemagne. Elles doivent renseigner le gouvernement sur ce
qui se passe aux armées. La première ligne est inaugurée le 30 novembre
1794. Les appareils étaient placés au sommet d'un édifice, le plus
souvent une tour, construite sur les points hauts.
Les responsables de leur fonctionnement, que l'on appelait des gérants,
se retransmettaient les messages à l'aide des trois manivelles qui
actionnaient les trois pièces mobiles de l'appareil. Le télégraphe de
Chappe fut une belle réussite à cette époque. Le réseau s'étendit sur
plus de quatre mille kilomètres grâce à 556 stations réparties sur 8
itinéraires principaux qui comportaient eux-mêmes 11 embranchements
secondaires.
Il y avait : La ligne Paris-Lille avec embranchement sur Boulogne et
Saint-Omer, avec prolongement sur la Belgique. La ligne Paris-Brest
avec embranchement sur Cherbourg. La ligne Paris-Strasbourg avec
prolongement sur Landau en Allemagne. La ligne Paris-Toulon avec
embranchementà Dijon, sur Besançon et, à Valence, sur Narbonne et
Perpignan. La ligne Paris-Béobie à la frontière Espagnole. La ligne
Bordeaux-Narbonne et deux autres de moindre importance, dont je n'ai
pas retrouvé les trajets.
Il était si utile et les Français en étaient si fiers qu'il resta en
service jusqu'au milieu du dix neuvième siècle. Il cessa de fonctionner
en 1852, après avoir été complété en juillet 1846, sur la ligne Paris
Lille, par un appareil électrique de Foy-Bréguet. Cet appareil devait
doubler le télégraphe de Chappe et pallier les difficultés de
transmission dues au brouillard. Malgré cet appoint, il dut céder la
place à un nouveau système de télégraphe, venu d'Amérique, mais qui
aurait bien pu naître chez nous.
En 1832, Samuel Morse, un peintre Américain, conçoit un appareil pour
transmettre les signaux. Afin de pouvoir le réaliser, il demande une
subvention au gouvernement Anglais sans succès. En 1833, de leur coté,
Gauss et Weber, deux physiciens Allemands, réalisent le premier
télégraphe électrique. Celui-ci ne dépasse pas le stade du prototype
car personne ne veut s'intéresser à leur appareil. En 1837, Samuel
Morse parvient à réaliser ce qu'il avait conçu.
En 1837, Samuel Morse parvient à mettre au point son appareil. Il a
rencontré Vail, le fils du propriétaire d'une modeste usine
d'électromécanique avec qui il s'est associé. Il demande alors une
subvention à la France. Notre gouvernement la lui accorde, mais à de
telles conditions que les associés ne peuvent que la refuser.
L'inventeur ne se décourage pas et continue à perfectionner son
appareil. En 1842, le temps ayant passé et son appareil est bien au
point.
Il tente une nouvelle démarche auprès du congrès qui lui vote une
subvention de trente mille dollars destinée à la construction d'une
ligne expérimentale entre Washington et Baltimore. Après quelques
difficultés pour disposer des fonds, on construit la ligne aussi
rapidement que les travaux peuvent avancer. Le 24 mars 1844, le premier
message frémit au long des 60 kilomètres de fil de fer galvanisé de la
ligne. Il comporte seulement quatre mots : What hath god wrought, en
Français : ce que dieu a forgé. Cette transmission sur une telle
distance suscite un grand enthousiasme, non seulement aux états unis,
mais partout dans le monde. L'inauguration n'aura cependant lieu qu'en
janvier 1845. Si vous vous demandez pourquoi on utilisait du fil de fer
alors que le cuivre est meilleur conducteur, sachez que les fils de
cuivre étaient volés aussitôt posés. Les autochtones en faisaient des
bijoux.
A cette époque, le besoin d'un moyen de transmission à grande distance
est extrême. Le développement industriel et commercial est très
important en Europe et aux états-unis et la lenteur des communications
est une gène pour le commerce. C'est enfin la victoire pour Samuel
Morse, maintenant sollicité partout. Il a réalisé un appareil simple
pour lequel il a créé un alphabet simple lui aussi. Son système
présente 3 avantages sur celui de Chappe.
La distance entre les stations peut atteindre 100 kilomètres,
le message est imprimé,
la transmission est indépendante des conditions climatiques.
En contrepartie, il faut tendre, entre les stations, un fil métallique
isolé du sol. Le télégraphe Morse utilise la faculté que posséde
l'électro-aimant d'attirer un morceau de fer quand un courant
électrique circule dans son bobinage et de ne plus l'attirer quand le
courant cesse d'y circuler.
L'appareil récepteur est constitué d'un électro-aimant placé au dessus
de l'extrémité d'une palette horizontale qui pivote sur un axe. à
l'extrémité de cette palette est fixée une plaquette de fer et, à
l'autre extrémité, est fixé un stylet encreur. Au dessous du stylet
encreur se déroule une bande de papier. Si l'on fait circuler un
courant électrique dans le bobinage de l'électro-aimant, la plaquette
de fer s'élève et l'autre extrémité de la palette, celle ou se trouve
le stylet encreur, s'abaisse sur la bande de papier et y laisse une
trace. Si l'on coupe le courant, l'électro-aimant cesse d'attirer la
plaquette de fer, la palette redevient horizontale et le stylet cesse
de toucher la bande de papier.
Si le courant a circulé très peu de temps dans le bobinage, le stylet a
tracé un point sur la bande de papier. S'il a circulé un moment, le
stylet a tracé un trait. Pour faire circuler le courant et le couper,
il suffit d'un interrupteur. Dans notre cas, il a une forme spéciale
qui permet de le manoeuvrer rapidement.
On lui a donné le nom de manipulateur. Il se compose d'un socle en
matière isolante sur lequel est fixé un levier en métal reposant sur un
pivot également métallique. Le fil amenant le courant électrique est
fixé sur le pivot et le fil transportant le courant électrique est fixé
à une pastille métallique placée sous une extrémité du levier.
Il suffit d'appuyer sur cette extrémité du levier pour qu'il touche la
pastille et que le courant électrique passe. Le manipulateur a complété
le circuit dans lequel le courant électrique parcourra des dizaines de
kilomètres pour aller alimenter l'électro aimant du poste récepteur en
provoquant l'inscription de traits et de points sur la bande de papier.
Pour permettre l'utilisation de son appareil, Samuel Morse a du
imaginer un alphabet à qui on a donné son nom : l'alphabet Morse. Les
lettres et les signes de ponctuation sont constitués soit d'un point ou
de plusieurs points, soit d'un trait ou de plusieurs traits, soit d'une
combinaison de points et de traits.
Un exemple va nous permettre de comprendre comment fonctionne le
système. Nous sommes à la station de Baltimore et nous voulons
transmettre un message à la station voisine. Nous appuyons sur le
manipulateur. Lecourant passe de notre pile dans le fil et va actionner
l'électro-aimant de la station voisine, le mot que nous voulons
transmettre est " TIME".
En alphabet Morse, la lettre T est représentée par un trait, la lettre
I par 2 points, la lettre M par 2 traits et la lettre E par 1 point Il
faut donc que nous appuyions, disons une seconde sur le manipulateur
pour transmettre la lettre T, puis, après une interruption de 2
secondes, que nous appuyions brièvement 2 fois de suite sur le
manipulateur pour obtenir la lettre I. Nous attendons encore 2 secondes
avant d'appuyer 2 fois pendant une seconde pour obtenir la lettre M.
Enfin, après l'attente de 2 secondes nous appuyons une fois brièvement
sur le manipulateur pour la lettre E qui est représentée par un seul
point. à Washington, la bande de papier portera la trace d'un trait, de
deux points, de deux traits, et d'un point. Le télégraphiste lira : T,
I, M, E, soit TIME (temps). Dans cet exemple la cadence a été
extrêmement lente.
En pratique, les opérateurs manipulent beaucoup plus rapidement.
L'appareil télégraphique, qui fut encore perfectionné par son inventeur
et par d'autres techniciens, est utilisé partout dans le monde. Les
lignes télégraphiques parcourent la terre et mème les mers depuis 1851,
année ou l'Anglais Breit réunit Douvres à Calais par le premier cable
sous-marin. En 1950, on estimait la longueur des lignes télégraphiques
à deux millions de kilomètres, soit 50 fois le tour de la terre.
Les câbles sous-marins étaient au nombre de 232 et, mis bout à bout,
s'étendaient sur cent dix mille kilomètres. Pour sa part la France
possédait environ deux cent mille kilomètres de lignes aériennes et
douze mille kilomètres de câbles souterrains. Le télégraphe de Chappe
avait été un succès en France. le télégraphe de Morse fut un succès
dans le monde. Les deux inventeurs ont montré la même inébranlable
conviction dans la valeur de leur idée. Tous deux ont répondu à un
besoin.
Tous deux ont ouvert la voie à d'autres recherches. Les inventeurs de
procédés électromécaniques de transmission furent nombreux. Je pense
que le plus connu est le Français émile Baudot. Il reste à s'affranchir
de la ligne. En effet, installer et entretenir les lignes
télégraphiques posent des problèmes politiques, techniques et
financiers. Il reste donc encore un progrès à faire : trouver le moyen
de transmettre des messages sans utiliser un moyen physique (matériel).
Ce n'est qu'en 1896 qu'une solution est présentée. Un scientifique
italien de 22 ans, Guglielmo Marconi, dépose le 2 juin un brevet pour
un appareil de télégraphie sans fil. Il dépose son brevet en
Angleterre. Que fait-il là ? Eh bien c'est sa mère qui l'a envoyé à
Londres. Elle trouve que les italiens ne s'intéressent pas assez à ce
que fait son fils et elle a raison. Les Anglais s'intéresseront
davantage aux projets de son fils car ce sont des commerçants.
Leurs douaniers furent les premiers intéressés et deux radioamateurs
américains, W6SAI et W2LX, racontent dans un de leurs ouvrages sur les
antennes verticales l'arrivée de Marconi en Angleterre. ( en
1986, un jeune scientifique italien arrive en Angleterre avec un
appareil mystérieux dans ses bagages. Les employés de la douane, qui
n'ont rien vu de semblable auparavant, examinent le fragile appareil
jusque dans le moindre de ses détails. Si bien que celui-ci se retrouve
dans l'état d'un navire naufragé (completely wrecked ) après leur
examen. à Londres, Marconi est présenté au ministre des postes et
télégraphes qui l'assure de son aide. Il y rencontre également des
hommes qui réfléchissent sur le sujet qui l'intéresse, Lord Kelvin,
Lodge, et Fleming entre autres. Durant ses études, Marconi a étudié les
théories de Maxwell sur l'existence des ondes électromagnétiques.
Les expérimentations de Hertz avec son éclateur à boules et son
résonateur, la découverte de Branly sur la radioconduction et ses
observations sur l'augmentation de portée obtenue grace aux longues
tiges métalliques dont il munissait ses appareils. Sans doute est-il
informé de la notion de syntonie dont parle Oliver Lodge et,
certainement aussi, des remarques de Popov sur la sensibilité apportée
par un long fil vertical dans la détection des orages lointains.
Notre physicien a, non seulement dans ses bagages, mais dans la tête,
devant les yeux, tout ce qu'il faut pour émettre et recevoir un signal
porté par une onde électromagnétique. Le transmetteur à étincelles
qu'il a construit est de très faible portée : quelques mètres
seulement, mais, déjà, un manipulateur Morse sert d'interrupteur. Il
modifie son appareil en lui adjoignant une antenne. Elle est verticale
et plantée dans le sol comme le paratonnerre de Popov.
Il a constaté que la portée passe de quelques mètres à quelques
centaines de mètres. Notre physicien vient de passer de l'induction au
rayonnement. Dans l'année 1895, il parvient à réaliser une liaison de
2400 mètres. Il est déjà fixé sur ce qu'il veut obtenir : traverser les
mers avec les ondes. Il se remet au travail avec ce nouvel objectif.
Les conseils, les avis, les appuis et surtout les crédits ne lui feront
pas défaut.
L'Angleterre voit dans l'idée du jeune inventeur une application pour
sa marine et son commerce. Ce qui n'est pas le cas en France ou
Ducretet, un ingénieur dont les buts sont identiques à ceux de Marconi,
se plaint de ne pas obtenir de crédits pour ses expérimentations. En
1987, Marconi fonde la Marconi's Wireless Telegraph and Signal Company.
Il réalise alors en mars, une liaison terrestre de 13 kilomètres.
En juillet 1897, une liaison de 20 kilomètres avec un navire de guerre
italien et l'installation de plusieurs stations. En 1898, Lord Kelvin
transmet le premier radiogramme entre deux stations Marconi installées
l'une sur l'ile de Wight et l'autre à Bornemouth, soit une
distance de 23 kilomètres. En mars 1899, une liaison au-dessus de la
Manche est réussie entre deux stations d'essais Marconi situées à
50 kilomètres l'une de l'autre, entre South foreland ( près de Douvres
) et Wimereux (près de Boulogne ).
En décembre 1901, avec l'aide de John A. Fleming, Marconi réussi
l'exploit : une liaison par TSF entre la Cornouaille, au sud de
l'Angleterre et Terre-neuve, région distante de trois mille quatre cent
kilomètres. En février 1902, des messages de la station de Poldhu, en
Cornouaille, sont reçus par le navire Philadelphia, à deux mille cinq
cent kilomètres.
La télégraphie sans fil a conquis ses lettres de noblesse. Elles sont
entre les mains de Marconi, de sa compagnie et de l'Angleterre. Lorsque
au cours de l'année 1900, le capitaine Gustave Auguste Ferrié a
découvert un détecteur électrolytique plus sensible que le cohéreur et
permettant de lire aux sons les signaux morse, vous saurez que la CW
est née et que la liaison entre stations terrestres et navires est une
réalité.
De ces premières années du siècle jusqu'au 31 janvier 1997, c'est à
dire pendant plus de 90 ans, des stations terrestres ont été à l'écoute
des navires et d'un éventuel appel de détresse. Aujourd'hui, le célèbre
S.O.S a vécu ainsi que le code Q. Il reste le mayday des liaisons
radiophoniques qui passera maintenant par l'intermédiaire d'un
satellite. Ce système est performant et ne nécessite pas de
connaissances spéciales. Il faut lui reconnaître ses qualités.
Ce n'est certainement pas sans nostalgie qu'il va falloir ranger parmi
les souvenirs le livre de chevet des opérateurs de bord : le handbook
for radio operator de la britisch telecom international, édité par
Llodyd's of London. Heureusement il reste les radioamateurs pour
maintenir vivant un procédé de communication qui a rendu d'immenses
services aux marins et à bien d'autres. Nous sommes certains qu'ils
continueront la tradition et que ce sera, pour eux, une raison de plus
d'étudier l'alphabet Morse et de pratiquer la C. W.
Fin de l'article.
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